Cet univers entier dans ma bouche
De et avec Isabelle Bats
Cheveux platine, corps planté au micro, lecteur son en main, texte à distance pour résister à la puissance de l'improvisation qui l'habite, Isabelle Bats enchante son auditoire par sa capacité à tirer un récit auquel croire d'une moindre évocation de chansons où l'Espace se conjugue au féminin. Issues de l'inventaire conduit par l'Observatoire de l'Espace, ces chansons, qui parfois ne jouent qu'un rôle de jalon dans nos mémoires, se transforment alors. Et tout devient possible : un rêve d'ailleurs, une rencontre, une envie. Le corps, le monde, les sensations, deviennent des élans qui se raccrochent à l'univers. En quelques notes, un espoir, des histoires de nos vies.
Constellations
De et avec Valérie Cordy
Avec son ordinateur et son écran, Valéry Cordy nous a offert de participer de manière condensée, en spationautes immobiles, au voyage de la mission Mars 500, en deux épisodes, aller puis retour. Entre juin 2010 et novembre 2011, durant 520 jours, six hommes ont fait l'aller-retour vers la planète Mars. Une expérience sans précédent qui n'était qu'une… fiction… Aucun de ces six astronautes n'a jamais quitté la plateforme de simulation basée à Moscou. À partir des tweets mis à disposition par l'Observatoire de l'Espace de Diego Urbina, participant sélectionné par l'ESA à l'expérience Mars 500, elle a construit par les images, textes, sons, et témoignages glanés sur Internet, cette conférence/performance, retraçant avec humour l'histoire de ces astronautes immobiles.
Dehors Dedans
De Pierre Meunier, avec Pierre meunier et
Jean-François Pauvros
Par le choix et la mise en voix habitée d'un extrait de Monologue intérieur de Babouillec, dite autiste sans paroles, Pierre Meunier accompagné de Jean-François Pauvros à la guitare, a créé un moment de suspension dans Sidération. Texte exceptionnel dans sa genèse, par son propos, et le statut de son auteur, Hélène Nicolas, dite « Babouillec » qui réussit à 21 ans à inventer une écriture, lettre à lettre. Celle-ci mène aux portes de ce qu'elle décrit comme « un désert édulcoré » : « Je le sillonne chaque jour pour trouver la sortie. .... Je plonge dans le cosmos tous feux éteints. Quelle merde le cosmos, j'avance comme une aveugle les yeux ouverts, nombril en radar. ». « Ce que raconte Tintin dans voyage au centre d'un cerveau d'autiste » selon ses mots s'est dévoilé aussi avec l'aide a-rythmique de l'entonnoir à boulets, tirés verticalement pour aussitôt retomber, manipulé par son inventeur, interprète et performeur.
Des vies sur Deuil Polaire
De Thierry Balasse, avec Thierry Balasse,
Eric Groleau et
Cécile Maisonhaute
Sur un texte de Jacques Sivan
Les spectateurs ont trouvé chacun un casque sous leur siège, seule voie d'accès à cette lecture/concert de Thierry Balasse construite à partir de fragments du texte de Jacques Sivan Des vies sur Deuil Polaire de la revue Espace(s) n°8. La « fonction spectateur » est abolie dans une semi-pénombre au profit d'un canal sonore et des échos intérieurs de chacun. Le texte est évocateur de la dégradation des fonctions corporelles et sensitives d'un personnage engagé dans des projets de terraformation. Si les musiciens - lecteurs, Cécile Maisonhaute au clavier, Eric Groleau aux percussions, étaient bien présents, le son transmis à chacun par des écouteurs stéréo générait l'envie de fermer les yeux, d'échapper à l'assistance et de s'imaginer en train de rêver, de fabriquer cette hallucination sonore...
Intégration
De et par Eric Cordier
Le public a été embarqué dans Intégration, étape de composition électro-acoustique -mixée en direct-, issue d'une première résidence au laboratoire de tests (vide, températures, vibrations) à l'Institut d'Astrophysique Spatiale du CNRS, d'où Eric Cordier a réussi une synthèse envoûtante de ses enregistrements sonores. Des cuves Jupiter, Mercure ou Saturne, un monde lointain simulé et confiné s'est révélé : écoute magnétique d'aimants de jauges, son d'une valve de pompe à vide, intégration d'une roue à filtre par pont roulant, enregistrements laser, portaient vers ailleurs d'abord doux, inquiétant, puis radicalement violent...
Introduction de Comment j'ai appris à ne plus m'en faire et à aimer le réchauffement climatique
De et par Frédéric Ferrer
Toujours à la limite d'emmêler, et nous avec, les idées et les digressions qui l'animent à foison pour traiter du futur du pôle Nord, Frédéric Ferrer en conférencier-performeur, a tenté de nous convaincre, images à l'appui, de l'importance du devenir de ce point du globe, bientôt réduit à s'incarner dans les limites d'un bateau touristique, nouveau territoire géographique où se croisent échelles minuscules et macroscopiques. Si crédible, que des spectatrices l'ont pris à parti, opinant ou non à ses énoncés ! Frédéric Ferrer pour Comment j'ai appris à ne plus m'en faire et à aimer le réchauffement climatique a bénéficié d'un accès à un corpus d'images satellites sur les glaces et des mesures (résultats du programme spatial DORIS) et a également rencontré un glaciologue travaillant avec des données spatiales.
La chute du Cosmonaute
De Jean-Bernard Pouy, avec Pablo Cueco, Thierry Legasa et Jean-Bernard Pouy
Avec ses épisodes composant en trois fois la « Chute du cosmonaute » dit par Jean-Bernard Pouy, avec en contrepoint ses transpositions acrobatiques du ténor Xavier Legasa, le tout rythmé par le zarb de Pablo Cueco et lié par ses interventions électro-acoustiques, un space-opéra « sidérant » a été créé. Les spectateurs réjouis se sont laissé prendre dans des péripéties narratives et scéniques qui prouvaient combien l'humour savait se déployer en radar et en protection d'un certain Galtarine, figure de l'humanité ballotée par l'histoire et les histoires, associé à une poésie rugueuse d'univers d'obsessionnels, enfermé dans le huis-clos humain, du plus affirmé dans la gloire technologique triomphante, au plus abandonné des anciennes conquêtes du Far-West.
La saga d'IBIS
De Michel Viso, avec Frédéric Le Junter,
Didier Petit et Michel Viso
Didier Petit et Frédéric le Junter ont travaillé avec Michel Viso, responsable des programmes d'exobiologie au Cnes autour de son récit de l'expérience spatiale IBIS. La Saga d'Ibis en a résulté, proposition faisant entendre le récit scientifique d'un acteur du spatial, intégrée au sein d'autres formes artistiques. Les trois voix ont tressé une vision sidérante de la persévérance, de l'acharnement, de la ruse avec les aléas que produit un univers extrême et de difficile. Les rebondissements de la mission IBIS avec pour vedettes des vers-cobayes, l'enfermement d'un esprit dans la figure modeste de Gagarine issu d'un texte du maltais I. Misfud, un bricolage démentiel électro-acoustique, en ont traduit les facettes obsessionnelles du sérieux, du glorieux et du dérisoire.
Mae
De et par Isabelle Duthoit
Si une voix peut dire la libération de toutes les énergies que nous contenons dans notre huis-clos intérieur, et que nous partageons sans le savoir avec tout humain, l'incroyable transe vocale d'Isabelle Duthoit a su nous la faire entendre. Sans compromis exotique, à la fois sincèrement elle-même et habitée de sons intérieurs venus du monde entier, elle s'est faite pour nous porte-parole orbitale de l'humanité, elle nous a fait voyager autour de tous les murmures, rires, grondements, cris, qui agitent notre vocosphère et dont elle s'est révélée le satellite exigeant.
Usedom Oratorio
De Philippe Braz, avec Brigitte Athéa, Philippe Braz et Markus Lang
Écrit et dit avec force par son auteur, Philippe Braz, a su sans lourdeur délivrer une vision subjective de l'entreprise de travail forcé que fut la construction par les nazis et les ingénieurs allemands des fusées V2 sur la base secrète de Usedom au nord de l'Allemagne. Les fragments vidéo tournés sur les lieux de mémoire, et retraités en solarisations irréalistes, tout comme la musique électronique de Markus Lang ont apporté la distance nécessaire pour évoquer comment des dizaines de milliers d'humains payèrent de leur vie le projet hitlérien d'armes de destruction, plus meurtrières dans ses usines secrètes, sous les ordres de Von Braun, que sur leurs cibles, et comment une certaine sidération peut naître à l'évocation de l'autre face du père du programme Apollo.
Vocabulaire Spatial
De Didier Petit, avec Etienne Bultingaire,
Didier Petit et Vladimir Tarrasov
Les portes à ouvrir de l'Espace sont aussi celles où s'aventurent nos mots, où s'explorent et se libèrent nos lexiques. Dans sa grande liberté d'improvisation du violoncelle, de la voix et du corps entier, Didier Petit a entraîné ses complices Vladimir Tarrasov et Etienne Bultingaire à faire entendre combien le huis clos spatial résonne dans les mots choisis pour la Semaine de la Langue française et de la Francophonie par la DGLFLF, partenaire de Sidération.
Fusée Diamant
De et par Sonia Chiambretto
Avec des images projetées d'archives photographiques de Hammaguir, base pour la présence spatiale française algérienne après les accords d'Evian, Sonia Chiambretto a livré sa vision de l'époque, partie d'un travail plus vaste qu'elle conduit sur l'Algérie dans une démarche d'enquête auprès de personnes interviewées en Skype. Elle a nourri son texte et sa performance de son dialogue mené auprès d'un acteur de l'époque, le Capitaine Robert, et dont certains extraits sont publié dans Espace(s) n°8. Elle en a fait la voix intérieure d'une mémoire de qui a vécu au quotidien des moments exceptionnels, entre banalisation et exaltation.
Mars 500
De et par Romain Charles
Romain Charles, après 520 jours en isolement volontaire entre juin 2010 et novembre 2011 pour l'expérience Mars500, était présent pour partager avec le public cette expérience. Comme s'il s'agissait de la première fois depuis sa « libération », et que nous étions des amis de confiance pour tout nous dire et nous révéler, tests de douleurs compris, avec ses images commentées, il a donné vie à son regard rétrospectif, français sélectionné dans le rôle de l'ingénieur de vol. Avec trois russes, un chinois et un italo-colombien, autre membre des nations de l'ESA, Agence spatiale européenne, c'est une odyssée humaine, sans dieu, qui a émergé de ce programme expérimental russe de simulation d'un aller-retour Terre-Mars.
Restitution
De Joris Lacoste, avec Nicolas Couturier et
Joris Lacoste
En scène, face à face, assis, Joris Lacoste interviewe avec une grande sérénité son partenaire, Nicolas Couturier, qu'il vient d'hypnotiser avant leur entrée dans la salle Ariane. Quelques spectateurs qui ont raté l'introduction, vont croire qu'il s'agit de l'interview d'un vrai spationaute. En fait, sur la base d'un échange avec le spationaute Jean-François Clervoy, l'auteur-metteur en scène a élaboré une histoire où l'expérience de la micropesanteur est centrale. Durant la performance, ou Restitution, ou encore discussion post-hypnotique, l'exploration est partagée en scène de ce qui a été vécu par l'invité en séance : sans doute jamais voyage dans la Station spatiale internationale n'a été aussi étonnant, du jeu à déployer « du coulis de fruits rouges en forme de nappe flottante, sculpture fine aspirée par chacun à la paille », aux « figures d'engrenages complexes » formés par les corps en exercice d'apprivoisement de la microgravité, jusqu'à la sortie extra-véhiculaire qui permit de « faire tourner la Terre au bout de la main »…
Soleilsang
De et par Stéphanie Lupo
Avec sa capacité à inventer in situ une scénographie de presque rien, -des flux bouillonnants de plastique, des néons, une manipulation de vitre inquiétante de brisures, des pâtes colorées, une métamorphose vestimentaire, une sortie de la salle pour finir de l'autre côté de ses baies vitrées dans un passage d'où le son de ses talons nous provenait comme sa voix en HF-, Stéphanie Lupo a mis sous tension son texte. Et nous avec, pour connecter mémoire et déracinement, espérance violente et corps en jeu, révolte féminine et transmission mère-fille. Ainsi une mobylette a pu être un rêve échoué de fusée de la mère pour tenter d'échapper à l'horizon du huis clos domestique. Ainsi l'échappée en un voyage décevant de la fille a dévoilé une ressource solaire intérieure par des contagions de forces telluriques et littéraires, incarnée dans le jaune d'un geste plastique final…
Sous le signe de Saturne
De et par Véronique Caye
Un acteur, Pierre Mignard, livre une conférence/performance sur la mélancolie et l'espace à travers une lecture de l'œuvre de W.G Sebald, Les anneaux de Saturne, P. Mignard interroge les motifs de ce texte - littérature, Histoire, voyages, sciences, archives - comme trace microscopique des éléments du macrocosme. Transposant des illustrations de l'auteur en l'image étrange d'un ballon peut-être vénusien trimballé en camion, il nous entraîne sur les pas de Sebald et de sa vision du réel menacé par la disparition.